La Cour Constitutionnelle sérieusement mise en cause !
Evénement sans précédent qui témoigne des bouleversements de fond qui s’opère dans le pays : un Conseiller de la CCC brise le silence et met sérieusement en cause son Institution : la Cour Constitutionnelle Comorienne (CCC). Dans son livre « la Cour Constitutionnelle : à réformer de toute urgence » M. Antoy Abdou « apporte les preuves du dysfonctionnement de cette institution ». On y trouve des rapports accablants sur la gestion administrative et financière (un exemple significatif, un séminaire qui aurait coûté plusieurs millions alors qu’il n’avait pas été tenu), sur des positions et décisions de la Cour et sur le traitement des dernières élections. Il met en cause l’impartialité des jugements de la CCC. Il dénonce des Conseillers, aux ordres de ceux qui les ont nommés. Il formule aussi des propositions de modification de la Constitution.
Bien évidemment certains chercheront en vain à désamorcer la bombe en spéculant sur l’initiative de M. Antoy ! Mais chacun sait que cela n’a pas été facile. M. Antoy ne pouvait pas agir ni donner l’impression d’agir sur un simple coup de tête, à la première incartade de la CCC. Il a fallu qu’il se convainque de l’état désespéré, irrécupérable de la CCC. L’essentiel en tout cas, est d’avoir finalement dénoncé l’inqualifiable et d’ouvrir une brèche dans un dispositif fortement verrouillé dont il ne fallait surtout pas contester la légitimité.
Car tout un chacun soupçonnait cette CCC de partialité, de corruption. Lors des dernières présidentielles, chacun percevait des mauvais signaux. Mais sans preuve précise, il était difficile de dénoncer l’imposture. Il en va tout autrement aujourd’hui, on est en droit de stigmatiser un SCANDALE D’ETAT.
Chaque citoyen comorien devrait mesurer le danger qui menace sérieusement le pays. Avec une telle CCC et une Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) qui fut sur le banc des accusés, qui a vu son président incarcéré pour gestion calamiteuse des ressources de la CENI, le pays a failli basculer dans la guerre civile lors des dernières présidentielles. Penser au 3ème tour ! Penser à l’intervention du Chef d’Etat-major pour faire publier les résultats !
La question concerne la suite. Le SCANDALE D’ETAT va-t-il être étouffé dans l’œuf comme tout l’indique. Car depuis la publication du livre, malgré les initiatives de M. Antoy Abdou, malgré quelques articles pertinents dans la presse écrite, on ne perçoit aucun mouvement d’indignation dans le pays. Le pouvoir se tait et fait taire la télévision nationale ! Ailleurs la presse se serait déchaînée, enquêtes, interviews se seraient succédés pour tenir en haleine la population et contraindre le pouvoir à réagir.
Notre Etat de droit démocratique est vicié. Il est censé architecturé autour de quatre pouvoirs indépendants qui s’auto réguleraient. En vérité l’exécutif seul existe et s’impose aux 3 autres. Le pouvoir législatif n’a pratiquement jamais joué un rôle de contrepouvoir. La situation s’est dégradée au fil des années comme l’illustrent les interventions militaires dans l’enceinte même de l’Assemblée nationale sans que cela choque qui que ce soit ! Pour beaucoup de simples citoyens, la justice comorienne est incapable de résister à l’exécutif. La création du Conseil de la magistrature ne semble pas avoir sensiblement modifié la donne. Quant à la presse, le fameux quatrième pouvoir, elle subit une répression multiforme et ploie sous les difficultés financières. La règle semble être l’auto censure ! « Baraka FM », le seul média qui osait la liberté n’a pas pu résister longtemps et le pays a assisté passivement à sa fermeture. Reste l’ « Archipel » avec son inébranlable fondateur, mais il paraît trop épisodiquement, trop rarement pour peser significativement sur l’actualité; le pays ne semble pas préoccupé à lui donner les moyens d’un minimum de régularité.
Notre système démocratique repose sur les élections dont les clés de voûte sont la CCC et la CENI, des organes indiscutablement gangrénés par la corruption. La voie est toute ouverte vers des débordements violents.
Le livre-événement de M. Antoy Abdou ne semble pas pouvoir servir de déclencheur d’un processus rédempteur. Il ne pourra pas provoquer un « CCC-GATE » comme on aurait pu l’espérer.
La balle se trouve donc dans les mains du Chef de l’Etat. M. Azali, qui a vécu personnellement les affres des dernières présidentielles, qui s’est trouvé en tant que candidat au bord du précipice. M. Antoy Abdou en appelle à lui dans son rôle fondamental de gardien des institutions. Les échéances électorales de 2021 se dérouleront-elles dans un climat apaisé ? Si d’aventure la situation demeurait bloquer, le pays s’en sortira-t-il ou basculera-t-il dans des violences post électorales ? C’est à l’actuel Chef de l’Etat d’en décider