L’économie comorienne réunit depuis la colonisation plusieurs difficultés : une population majoritairement jeune à laquelle il faut offri...
L’économie comorienne réunit depuis la colonisation plusieurs difficultés : une population majoritairement jeune à laquelle il faut offrir un emploi, une minorité travaillant pour une majorité, une forte démographie, un manque de terres agricoles, des techniques de production rudimentaires, une production vivrière insuffisante (essentiellement tournée vers les plantes industrielles : vanille, girofle et ylang) pour les besoins locaux (d’où des importations massives), absence d’infrastructures et d’équipements nécessaires au bon fonctionnement d’un pays (peu de routes, ports sous-équipés, manque de compagnie aérienne, hôpitaux et écoles insuffisants, adduction d’eau et électrification embryonnaires…). D’où une économie mal partie, déjà sous perfusion à l’époque coloniale : l’administration du pays fonctionne grâce à l’argent venant de Paris (Mahmoud Ibrahime, Said Mohamed Cheikh 1904-1970. Parcours d’un conservateur) !
A ces handicaps déjà très lourds s’ajoute le grand mariage à Ngazidja, l’île-capitale du pays. Cette institution est devenue un bulldozer très puissant, qui ne supporte la concurrence d’aucune autre autorité et écrase du coup tout au passage : religion comme politique. Elle fige les mentalités de l’île motrice du pays dans des comportements complètement irrationnels et la population dans une situation de pauvreté permanente.
A ces handicaps déjà très lourds s’ajoute le grand mariage à Ngazidja, l’île-capitale du pays. Cette institution est devenue un bulldozer très puissant, qui ne supporte la concurrence d’aucune autre autorité et écrase du coup tout au passage : religion comme politique. Elle fige les mentalités de l’île motrice du pays dans des comportements complètement irrationnels et la population dans une situation de pauvreté permanente.
Or ce pays a vocation sinon à sortir de la misère du moins à la réduire. Car comment persister à demeurer dans des pratiques d’un autre temps (dépenser toutes ses économies et s’endetter !) non pas pour construire un avenir mais pour respecter scrupuleusement la tradition ? Le développement économique d’un pays présuppose une société en perpétuelle transformation et exige une « […] volonté non de subir mais de dominer le milieu naturel, et du même coup, souci simultané de mesure, de rationalité, d’avenir (ou de prévision). » Et dans cette perspective, « L’avenir n’est pas conçu comme répétition de ce qui a été […]. La tradition ne suffit plus à consacrer les pouvoirs et les institutions » (Raymond Aron, Les Sociétés modernes).
Et c’est là qu’on attendrait de Mohamed Ali Soilihi, cet ingénieur agronome très expérimenté, a priori connaisseur de la situation nationale et internationale, plusieurs fois ministre des finances, une expertise économique et financière capable de sortir le pays de l’impasse économique dans laquelle le pays se débat depuis toujours. On nous le présente depuis toujours d’ailleurs comme quelqu’un de rigoureux et compétent apprécié des pays amis et des bailleurs de fonds. Il semble du reste qu’il soit très bien vu à l’Elysée !
Mais non pas du tout : tout ce qu’il a réussi à faire, c’est à être ministre de tous les gouvernements successifs depuis plus de trente ans ! Quant à ses compétences, on peut les chercher longtemps mais je crains qu’on ne les trouve nulle part. Se limiteraient-elles à plaire aux bailleurs de fonds pour qu’ils l’imposent à tous les présidents comoriens au ministère des finances ?
On constate cependant que même ces bailleurs de fonds commencent à le lâcher : de rapports en rapports, le FMI répète que l’économie du pays va mal – et les Comoriens, eux, s’en rendent compte tous les jours ! Dans son rapport du 16 juin 2015, le FMI décrit une situation quasi-apocalyptique du pays : « La situation économique des Comores s’est dégradée au cours des derniers mois. La crise dans le secteur de l’électricité a affecté négativement l’activité économique […] La situation budgétaire difficile a été impactée par l’augmentation de la masse salariale […] ». Et le FMI d’ajouter que « […] les perspectives demeurent difficiles pour l’économie comorienne. »
C’est bien ce Mohamed Ali Soilihi, politique médiocre, homme incompétent et déjà un problème dont le pays n’arrive pas à se débarrasser, qui envisage de quitter la place de l’indépendance pour Beit Salam. Les Comoriens jugeront en âme et conscience. Mais qu’ils ne se plaignent pas après car on ne change pas à quatre-vingts ans.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres, ancien enseignant à l’Université des Comores, fondateur du groupe scolaire Léopold Sédar Senghor (Nioumadzaha Bambao) est professeur de Lettres modernes dans la région lyonnaise. Il a signé trois essais chez l’Harmattan : Un Métis nommé Senghor (2010), Le Roman de Mohamed Toihiri dans la littérature comorienne (2012) et Réception de Léopold Sédar Senghor (2014). Il est chroniqueur à Albilad (hebdomadaire publié à Moroni).
Photo d'illustration ©habarizacomores
Et c’est là qu’on attendrait de Mohamed Ali Soilihi, cet ingénieur agronome très expérimenté, a priori connaisseur de la situation nationale et internationale, plusieurs fois ministre des finances, une expertise économique et financière capable de sortir le pays de l’impasse économique dans laquelle le pays se débat depuis toujours. On nous le présente depuis toujours d’ailleurs comme quelqu’un de rigoureux et compétent apprécié des pays amis et des bailleurs de fonds. Il semble du reste qu’il soit très bien vu à l’Elysée !
Mais non pas du tout : tout ce qu’il a réussi à faire, c’est à être ministre de tous les gouvernements successifs depuis plus de trente ans ! Quant à ses compétences, on peut les chercher longtemps mais je crains qu’on ne les trouve nulle part. Se limiteraient-elles à plaire aux bailleurs de fonds pour qu’ils l’imposent à tous les présidents comoriens au ministère des finances ?
On constate cependant que même ces bailleurs de fonds commencent à le lâcher : de rapports en rapports, le FMI répète que l’économie du pays va mal – et les Comoriens, eux, s’en rendent compte tous les jours ! Dans son rapport du 16 juin 2015, le FMI décrit une situation quasi-apocalyptique du pays : « La situation économique des Comores s’est dégradée au cours des derniers mois. La crise dans le secteur de l’électricité a affecté négativement l’activité économique […] La situation budgétaire difficile a été impactée par l’augmentation de la masse salariale […] ». Et le FMI d’ajouter que « […] les perspectives demeurent difficiles pour l’économie comorienne. »
C’est bien ce Mohamed Ali Soilihi, politique médiocre, homme incompétent et déjà un problème dont le pays n’arrive pas à se débarrasser, qui envisage de quitter la place de l’indépendance pour Beit Salam. Les Comoriens jugeront en âme et conscience. Mais qu’ils ne se plaignent pas après car on ne change pas à quatre-vingts ans.
Nassurdine Ali Mhoumadi, docteur ès Lettres, ancien enseignant à l’Université des Comores, fondateur du groupe scolaire Léopold Sédar Senghor (Nioumadzaha Bambao) est professeur de Lettres modernes dans la région lyonnaise. Il a signé trois essais chez l’Harmattan : Un Métis nommé Senghor (2010), Le Roman de Mohamed Toihiri dans la littérature comorienne (2012) et Réception de Léopold Sédar Senghor (2014). Il est chroniqueur à Albilad (hebdomadaire publié à Moroni).
Photo d'illustration ©habarizacomores
COMMENTAIRES