La ministre française de la Décentralisation veut faire de Mayotte un département à part entière. En visite à Mayotte, la ministr...
La ministre française de la Décentralisation veut faire de Mayotte un département à part entière.
La visite est passée inaperçue, et pourtant, elle
a marqué une étape importante pour beaucoup de dossiers locaux.
Dimanche et lundi, Marylise Lebranchu était en visite à Mayotte. La
ministre de la Réforme de l’Etat, de la Décentralisation et de la
Fonction publique a fait le point sur la situation de l’île, qui est
depuis 2011 le 101ème département de France. Elle a donné les grandes directions à suivre sur de nombreux chantiers.
Pour Ibrahim Aboubacar, député (Socialiste républicain et citoyen, SRC) de la première circonscription de Mayotte interrogé par leJDD.fr,
"cela a été une visite instructive pour elle. Elle lui a permis de
mieux comprendre les réalités de ce nouveau département". Elle a ainsi
passé en revue les principales questions économiques et sociales du
territoire, à commencer par les sujets de son ministère.
La fonction publique à égalité avec les autres DOM
La
ministre a confirmé "la volonté du gouvernement de poursuivre la
départementalisation de Mayotte", selon un calendrier que le député
qu’Ibrahim Aboubacar juge "ambitieux et resserré". Il s’agit en effet
d’arriver, d’ici la fin du quinquennat de François Hollande, à un
dispositif de rémunération de la fonction publique identique à celui des
autres départements d’Outre-mer (DOM). Les agents de l’Etat en poste
dans l’île auront ainsi droit aux congés bonifiés (qui comprennent une
prise en charge financière pour un voyage dans son territoire
d’origine), à l’indemnité de sujétion géographique, et à la fin de la
limitation de la durée d’affectation : elle était auparavant fixée à
deux ans et renouvelable une seule fois.
L’Europe, horizon de Mayotte
L’Europe est un autre grand chantier évoqué par la ministre. Au 1er
janvier 2014, Mayotte obtiendra le statut de Région ultra-périphérique
(RUP) de l’Union européenne (UE), ce qui lui permettra de toucher des
fonds structurels de Bruxelles. Selon le député, Marylise Lebranchu " a
lourdement insisté sur la nécessité d’avoir une vision globale,
coordonnée, des priorités du développement économique, et dans ce cadre
elle a annoncé que les services du secrétariat général aux affaires
économiques seraient renforcés pour aider à la programmation et au
pilotage des fonds européens". Les types de projets pour lesquels
Mayotte pourra demander une subvention européenne ont été définis. Il
s’agit désormais de finaliser les priorités du département, et de les
répartir selon les subventions à obtenir, soit au niveau européen, soit
au niveau national ou local.
Des enjeux socio-économiques majeurs
Pour
Ibrahim Aboubacar, il faut donc concentrer les efforts sur les grands
axes de développement de l’île. Il les résume : " L’agriculture et la
pêche, le développement du tourisme, le désenclavement aérien et la
protection de l’environnement". Outre le développement économique, les
questions sociales posent de graves difficultés au département : il faut
notamment améliorer l’accompagnement des 3.000 jeunes isolés de l’île.
Enfin, le manque de logements a également interpellé la ministre. Elle a
annoncé la création d’un établissement public foncier, qui conduira à
l’élaboration d’un cadastre. Il devrait permettre une meilleure maîtrise
du développement urbain, ainsi qu’une plus grande efficacité dans le
recouvrement fiscal.
Mais le Collectif des
associations et des amis des Comores, opposé à la séparation entre
Mayotte et le reste de l’archipel, conteste avec force à
l’approfondissement de la départementalisation. Selon son porte-parole,
Mustapha Abdou-Raouf, joint par leJDD.fr, les Mahorais ont subi
une détérioration de leurs conditions de vie depuis que Mayotte est un
département français, et pointe une augmentation du coût de la vie. Il
ajoute que "plus Mayotte va se séparer des Comores, et plus les Comores
vont devenir pauvres". Selon lui, le creusement des disparités
socio-économique entre Mayotte et les trois autres îles de Comores fait
naître le risque de la marginalisation de ces dernières, dont les
habitants ne profiteront pas des équipements installés côté français.
Mayotte
semble donc se trouver à une croisée des chemins. Elle espère élaborer
une dynamique pour insuffler son développement économique et amorcer son
désenclavement. Dans ce but, le renfort de l’aide européenne sera bien
nécessaire pour lui permettre de rattraper son retard sur les autres
départements et régions d’Outre-mer du territoire français. Mais ce
faisant, elle risque de se marginaliser les trois autres îles
comoriennes, qui connaissent déjà de plus grandes difficultés.