Les défis du quinquennat de Sambi

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Dès son arrivée à Beit Salam en 2006, l’ancien président de l’Union des Comores , Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi fut amené à opé...



Dès son arrivée à Beit Salam en 2006, l’ancien président de l’Union des Comores, Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi fut amené à opérer des choix, à dégager des priorités  face à la réalité des multiples défis qui menaçaient les Comores. Les choix alors retenus rentraient tous dans le cadre d’une vision stratégique globale sous-tendue par deux objectifs majeurs : la relance économique et l’instauration d’un climat politique et social apaisé.

Il fallut trouver une solution au défi du poids excessif de la dette extérieure estimée à près de 110 milliards de francs comoriens en 2006. Pour la première fois depuis des décennies, le pays commençait à rembourser sa dette publique, seule voie pour espérer renouer avec la communauté financière internationale et conclure un programme formel en bonne et due forme avec les institutions de Bretton-Woods.

Ce choix judicieux a permis fin 2012 aux Comores d’accéder au point d’achèvement de l’Initiative des Pays Pauvres Très Endettés (IPPTE), avec toutes les perspectives que l’on connait, de réduction, voire d’annulation totale de la dette extérieure, de renforcement  de l’aide publique au développement et de relance de l’investissement étranger direct grâce à la confiance retrouvée.

Il fallut aussi s’atteler à rehausser l’image de marque des Comores à l’extérieur, image si souvent malmenée. Et en même temps adapter la diplomatie comorienne à la réalité pratique d’aujourd’hui : une diplomatie volontariste au service des intérêts économiques et commerciaux nationaux. L’ouverture du pays à de nouveaux horizons s’imposait, au-delà du renforcement des relations de coopération avec les partenaires traditionnels des Comores. Un horizon tout naturel et prometteur a été le monde arabo-islamique : les Comores sont un pays arabe disposant de surcroît de réelles potentialités de développement, maritimes, touristiques et autres, à même d’attirer les investisseurs et les capitaux arabes.

Il fallut encore, toujours sur l’aspect de la relance économique, imaginer les voies et moyens de «planter un arbre à sous » selon l’expression même de Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi. En d’autres termes de créer des revenus au profit de l’Etat, comme renfort aux recettes nationales enregistrées très limitées, de l’ordre de 23 milliards de francs comoriens seulement par an : « le budget d’un club de football européen », selon encore Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi.

 Une réussite par excellence, de l’initiative de «planter un arbre à sous » reste à ce jour, l’adoption et la promulgation de la loi sur la citoyenneté économique en 2008. Les fonds issus de la citoyenneté, estimés à quelques 200 millions de dollars US permettent aujourd’hui à  l’Etat d’investir massivement sur les infrastructures routières sur toute l’étendue du territoire national, infrastructures qui avaient tant besoin de telles mannes financières vu leur état de délabrement avancé. Ils contribuent aussi par ailleurs à assurer le paiement régulier à chaque fin du mois des salaires des agents de l’administration publique et relever ainsi le défi de l’accumulation des arriérés de salaires des fonctionnaires.

Un tout autre défi fut la normalisation des relations conflictuelles qui perduraient entre l’ile autonome d’Anjouan et  le reste du pays. Le processus se heurta malgré les bonnes dispositions de Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi à l’intransigeance, à la soif du pouvoir des autorités en place, intransigeance et soif du pouvoir poussées à l’extrême jusqu’à l’éclatement de la rébellion de 2007. Le défi prit alors une toute autre dimension : la libération de l’ile des mains des rebelles dirigés par le colonel Mohamed Bacar.

La stratégie mise en œuvre à cet effet passa par la mobilisation et la réorganisation de l’Armée Nationale de Développement (AND) afin, entre autres, de la débarrasser une fois pour toutes du sobriquet peu flatteur « nayile yi lale », traduction littérale : « manger et dormir », avec au passage la nomination d’un nouveau chef d’Etat-major, par le renforcement massif aussi de la force de frappe de l’armée, en armes lourdes et moyens logistiques et enfin par l’acquisition de deux hélicoptères de transport de troupes.

Tout au long de ces étapes, Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi a fait montre d’une patience et d’une persévérance à toute épreuve. Il s’est montré en particulier sourd aux sirènes des va-t-en-guerre qui, convaincus à tort ou à raison de la supériorité supposée de l’AND sur les forces rebelles à chaque étape franchie, appelaient à un débarquement militaire immédiat sur l’ile.

Soucieux de minimiser les pertes en vies humaines et autres destructions, Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi s’imposa au contraire un ultime délai, une quatrième étape consistant à solliciter l’implication effective de l’Union Africaine à l’inéluctable débarquement militaire annoncé. Le 25 mars 2008, l’AND appuyée par des bataillons tanzaniens et soudanais lança l’opération « Démocratie aux Comores » et libéra Anjouan sans effusion de sang, avec la grâce divine.
Se posa ensuite le défi de la constitution en vigueur votée en 2001. Certes, la loi fondamentale accordait une large autonomie aux iles, mais présentait trois écueils majeurs.

L’architecture de quatre constitutions, quatre présidents, quatre gouvernements, et quatre parlements s’avéra extrêmement coûteuse par rapport aux ressources disponibles de l’Union des Comores. Par ailleurs, le bon fonctionnement de l’architecture, et plus précisément, celui des relations entre les entités, Union et iles autonomes, et par voie de conséquence des institutions de l’Etat en général se révéla très laborieux, donnant souvent lieu à des blocages engendrés par des conflits dits de compétence, intrinsèques à l’article 6 de la constitution. Enfin, l’architecture sous-entendait la tenue d’élections à l’échelon national ou local presque tous les ans. La récurrence approchée des scrutins prévus, outre la dispersion fort probable des forces vives de la nation dans des susceptibilités politiciennes, risquait de mettre à mal encore plus les ressources disponibles de l’Etat.

De par ce qui précède, il urgeait de procéder à une reforme de la constitution. La loi référendaire du 17 mai 2009 garantit alors une meilleure applicabilité de l’architecture institutionnelle, une définition claire des compétences entre les entités et une harmonisation du calendrier électoral. Pour ce dernier point, deux à trois échéances électorales interviendraient ainsi tous les cinq ans : les élections couplées du président de l’Union et des gouverneurs des iles, celles toujours couplées des députés et des conseillers des iles et enfin, celles des maires et des conseillers municipaux.

Enfin, le climat politique et social, pour être tout à fait apaisé, supposait après la tournante d’Anjouan, des institutions fortes et stables à même de préserver les acquis de la présidence de Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi et les consolider encore davantage. Ce qui fut fait.

 En effet, le nouveau président de l’Union, Docteur Ikililou Dhoinine, originaire de l’île de Moili à laquelle échut la tournante, fut élu avec des vice- présidents et des gouverneurs, tous issus de la même mouvance politique, à l’exception peut-être du gouverneur de l’île de Djoumbé Fatima. Il hérita aussi d’une assemblée nationale et des conseils des îles dominés par la même mouvance. La situation qui prévalait aux Comores en mai 2011 lors de l’arrivée du président Docteur Ikililou Dhoinine à Beit Salam est unique en son genre : aucun président comorien avant lui n’a eu le privilège de connaitre une telle stabilité politique et de telles perspectives de croissance du pays.

Les défis relevés ici tous d’ordre structurel, devaient l’être un jour ou l’autre afin de jeter des bases saines et solides pour un réel décollage socio- économique des Comores. La vision, la stature de l’ancien président de l’Union des Comores, Oustadh Ahmed Abdallah Mohamed Sambi ainsi que son implication personnelle ont permis de les réunir en un laps de temps aussi court de cinq ans. Il s’agit maintenant d’aller résolument de l’avant et de bannir une fois pour toutes, toute velléité de retour en arrière et la fatalité de l’eternel recommencement. Le temps n’attend pas.

Mahamoudou Ahmed Bacar
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