Mme Aboutoihi, pouvez-vous vous présenter en quelques mots, ainsi que la nature de vos activités associatives ? Mon nom est Aîda ABOUTOI...
Mme Aboutoihi, pouvez-vous vous présenter en quelques mots, ainsi que la nature de vos activités associatives ?
Mon nom est Aîda ABOUTOIHI, j’ai 31 ans et suis originaire des Comores , ayant quitté les Comores très jeune, j’ai suivi des études de commerce à Bordeaux . Je me suis par la suite spécialisée dans le domaine de la banque –assurance à Paris.
Après avoir exercé une fonction d’encadrement au sein du groupe AXA France et par la suite France TELECOM j’ai décidé de rejoindre l’île de Mayotte en 2009 où j’ai travaillé au sein de la BFCOI (filiale de la société générale) c’est à ce moment là que j’ai rejoins l’association lainga culture océan indien en tant que trésorière.
Ensuite en 2011 je suis rentrée à Moroni, j’ai impulsé la création de l’ALCOI section Ngazidja en janvier 2012 et j’ai été nommé présidente de cette section.
Notre association se nomme Association Lainga Cultures Océan Indien (Alcoi). Le but de cette association est de promouvoir la culture de l’Océan Indien sous toutes ses formes. ALCOI a vu le jour à l’île de la Réunion en 2006. Le siège est transféré à Mayotte depuis 2010. Après avoir été trésorière d’ALCOI Mayotte, l’idée de créer la section de Ngazidja a germé étant de retour sur l’île. Ceci est devenu une opportunité qui a eu l’adhésion unanime d’ALCOI Mayotte. C’est là une occasion pour se rapprocher de sa population d’autant qu’elle a besoin d’un appui pour promouvoir son patrimoine culturelle dans toutes les îles.
L’idée s’est concrétisée ayant observé sur terrain qu’au niveau de la culture, les femmes s’investissent beaucoup plus que les hommes. Cette présence est effective dans toutes les activités traditionnelles, que ce soit la vannerie, les danses traditionnelles, la poterie, la chanson, en un mot dans presque tous les domaines de la culture. J’ai donc décidé de les accompagner parce qu’il me semblait que ces initiatives manquaient d’un encadrement leur permettant de s’exprimer comme elles le désiraient.
C’est donc l’objectif qui fut arrêté par l’Alcoi pour l’année 2012 :
« être proche de ces femmes pour les accompagner et les aider à s’épanouir ».
Nous sommes fiers de nos actions tout en restant humble, car depuis la journée que nous avons organisé au foyer des femmes, nous avons pu mettre en relation une association qui recycle les plastiques pour faire des sacs, des accessoires etc, en relation avec les bailleurs tels l’Union Européenne, à travers le PCD (Programme de Coopération Décentralisée). Grâce à cette manifestation, les femmes ont bénéficié d’une formation de huit jours, dispensée directement dans les villages. Cette activité leur a permis de valoriser leur travail en créant une cohésion et un projet commun. Pour nous c’est une réussite car notre objectif de vouloir les sortir de l’ombre est atteint.
Justement, sur la question de l’artisanat, j’ai noté qu’aux Comores on en parle finalement très peu. On possède cette impression que l’artisanat est très peu développé voire inexistant. Comment vous expliquez ce phénomène ?
Hélas c’est l’amer constat alors qu’auparavant l’artisanat comorien se voyait beaucoup plus ne serait-ce qu’au Marché. Je pense que cela est venu avec le fait que le transfert de savoir n’a pas été automatique, les jeunes s’intéressent plus à ce qui vient de l’extérieur, et tout le monde se rabat sur l’artisanat malgache. La dureté économique a laissé la place au pessimisme. La réflexion des femmes comoriennes est : « Pourquoi je vais me lancer dans l’artisanat et essayer d’en vivre puisque ça ne mène à nulle part ». Le changement doit intervenir ici !
Nous sommes là pour les aider à comprendre que les choses peuvent changer, que l’artisanat offre des débouchés, notamment vers les pays de la Région et qu’elles peuvent devenir actrices de leur propre destinée.
J’ai l’impression que maintenant il existe une lueur d’espoir, et que quelque chose s’est ravivée chez ces femmes. Elles commencent à prendre confiance en elles, et c’est la première condition pour faire naître ou renaître un artisanat quasi moribond.
Mais selon vous, pourquoi le rôle des femmes est si important pour les Comores, quelle place doivent-elles tenir dans l’évolution du pays et des mœurs ?
Nous convenons tous à dire que la société comorienne est matriarcale. Et donc la femme comorienne, je dis la femme parce que je la trouve extraordinaire, doit trouver les ressources et le courage et a besoin d’un accompagnement. Elle manque terriblement de confiance en elle.
Je suis convaincue que l’avenir des Comores c’est la femme avant tout ! Et je pèse mes mots ! Les comoriennes sont très, très dynamiques et elles réalisent des choses merveilleuses. Je pense que miser sur les femmes comoriennes, c’est s’assurer que la société évoluera dans le bon sens, et que les Comores pourront aller loin.
Il est vrai que la société comorienne est matriarcale, mais paradoxalement on s’aperçoit qu’il existe d’énormes disparités entre les hommes et les femmes, quels sont les points à améliorer, les choses à changer selon vous ?
Je pense qu’on a fait croire à la femme comorienne que pour être acteur du développement il faut nécessairement faire des études. Or aux Comores, les femmes par définition ne font pas d’études, ou beaucoup moins que les hommes. Elles ont dû rester au foyer, à élever les enfants, même si elles ont un certains potentiel, on leur fait croire que parce qu’elles n’ont pas fait d’études, elles ne pourront pas aller loin.
La réponse doit être une alphabétisation des femmes (lutter contre l’illettrisme) et également leur donner des formations dans les domaines de la gestion, du commerce, comment vendre leurs produits. Si je prends l’exemple de Planète Finance, sous la responsabilité de Mme Anne Delvern, je trouve que les actions entreprises sont formidables. Ils mettent en place des ateliers pour les aider à avoir ce volet de l’éducation dont elles ont besoin pour avancer.
Est-ce que la situation aux Comores est comparable à d’autre pays dans l’Océan Indien, puisque l’Alcoi est présente dans toute la région ?
Il me semble qu’il n’existe pas de parallèles possibles entre les Comores et les autres pays de la région. Je pense même que les Comores se trouvent dans une position de retrait, et possède un retard vis-à-vis des autres îles ou pays. Si je compare à Madagascar, où la situation économique est quand même assez précaire, là bas il y a une culture de l’artisanat très poussée.
Pour moi d’ailleurs, Madagascar est un exemple à suivre de ce point de vue là, puisque les femmes ont peu de moyens, mais parviennent néanmoins à réaliser des choses formidables.
Existe-t-il une action que la classe politique comorienne devrait entreprendre, afin de remédier à cette situation ?
L’Alcoi comme bons nombre d’associations ne peut se substituer à tout et à elle toute seule résoudre les problèmes de la société comorienne. Il faudrait créer des passerelles entre ces associations et les organisations gouvernementales et non gouvernementales. Et c’est sur ce point que l’Etat doit intervenir pour favoriser la création de synergies autour des différents acteurs du développement durable.
Je pense notamment au Commissariat au Genre qui représente un moyen de réaliser des actions concrètes. Une collaboration avec le commissariat, pour vraiment venir en aide aux femmes par exemple, serait quelque chose que nous pourrions mettre en place sans trop de réserves.
L’Alcoi reçoit le soutien de certains bailleurs de fonds et notamment la France, quel rôle la France peut-elle jouer dans le soutien de l’artisanat des femmes à Ngazidja ?
Le Fond de Coopération Régionale de Mayotte a joué un rôle important, et continu d’occuper une place centrale dans notre fonctionnement. C’est un allié de poids et je ne sais comment les remercier, parce que sans l’accompagnement du FCR, on ne pourrait pas réussir toutes ces actions.
Par exemple pour la journée de la femme que nous avons organisée le 10 mars 2012 au foyer des femmes de Moroni, soulever des fonds au niveau des acteurs économiques ici aux Comores a été un vrai parcours du combattant. Nous avions finalement réussi à le faire tant bien que mal, sans trop de moyens. Nous avons besoin de continuer à bénéficier du soutien du FCR dans nos actions, ici comme à Mayotte.
Quelles sont les prochaines échéances et dates importantes à retenir ?
Le salon de la mode a marqué ses premiers pas en 2008 dans la commune de Sainte-Marie (Ile de la Réunion). Le succès de cette manifestation rayonne encore aujourd’hui à mayotte grâce aux adhérents bénévoles de l’association, de nos partenaires et de nos sponsors.
Le principe de ce dernier est une réalisation à partir d’un tissu choisi et fourni gracieusement par l’association. Le tissu varie en fonction des années ; par exemple en 2009, c’était le tissu salouva ou lesso qui a été choisi ; en 2010 c’était la toile de jute.
Ensuite au mois de septembre, nous désirons mettre en place un calendrier au niveau des écoles, c’est-à-dire proposer des ateliers au sein même des établissements. Avec des activités comme par exemple réaliser des objets avec des sachets recyclés, ou la danse traditionnelle comorienne, et ainsi de suite pour sensibiliser les enfants à la culture.
Puis il y aura le concept Lainga qui veut dire errer en comorien : nous irons faire le tour de toutes les régions de la Grande Comore, pour mettre en place ce concept. Il s’agit d’allier la culture moderne à la culture traditionnelle. Nous amenons la culture moderne (projection films comoriens, danse contemporaine, théâtre…) dans les villages, et les villageois partagent la culture traditionnelle (différentes danses traditionnelles…).
Dans le futur, comptez-vous travailler avec les services de coopération français ?
Je pense que comme toute jeune section nous avons besoin d’asseoir notre crédibilité, donc je pense qu’à travers toutes les actions que nous souhaitons réaliser, nous approcherons naturellement les services de coopération culturelle français comme nos confrères de l’Alcoi Mayotte. Pour le moment il me semble que c’est trop précoce, il nous faut d’abord faire nos preuves à la Grande Comore en menant à bien des projets. Mais par la suite nous aurons besoin d’eux, ça ne fait aucun doute.
Votre stratégie de développement prévoit-elle un rapprochement avec d’autres associations dans l’avenir ?
L’objectif final de l’Alcoi est de devenir une ONG, et donc pour y parvenir nous allons nous rapprocher d’autres associations issues des autres îles de l’océan indien. Des prises de contacts sont en cours d’étude avec des associations de Madagascar et la réunion afin créer de véritables échanges de savoirs faire. La mairie de Moroni encourage véritablement nos initiatives. Pour le moment nous travaillons avec l’association féminine d’Itsandra (AFDS) qui est notre partenaire, au même titre que le Campus Paysan, nous avons une association d’homme qui fait des spectacles de danse traditionnelles, nous avons aussi une troupe musicale qui va être partenaire et deux autres associations féminines qui nous rejoindrons.
Mais justement nous essayons d’avoir des entretiens avec ces associations en leur disant « voilà, il faut absolument être dynamique, et œuvrer pour un but réel ». Donc un choix pointilleux est fait en amont par l’ALCOI .
Le projet de devenir une ONG est pour quand précisément ?
C’est pour 2013 ! Et nous nous en rapprochons de jour en jour.
Comment fonctionne l’Alcoi, existe-t-il une rémunération ?
Non il n’existe pas de rémunération, c’est du bénévolat, cependant les membres de notre bureau sont très actifs et sont motivés pour accomplir leur mission. Nous ne pouvons nous permettre de rémunérer nos membres, et nous souhaitons que ça reste ainsi. Le bénévolat est le mode de fonctionnement que nous avons choisi et il nous semble le meilleur pour ne pas dénaturer nos objectifs.
Exercez-vous une activité professionnelle en dehors de l’association ?
Je suis rentrée aux Comores depuis plus d’un an et j’ai travaillé dans le domaine bancaire et suis actuellement missionnée par l’Onudi (Organisation des Nations unies pour le développement industriel).
Combien d’heure d’investissement représente votre activité ?
Je ne compte plus ! Je pense qu’il faut vraiment aimer ce qu’on fait, et se donner à 200% pour que les gens nous suivent. Il faut insuffler l’exemple pour changer les comportements.
Quels conseils donneriez-vous à une jeune femme désirant vous rejoindre, ou mener à bien un projet similaire ?
Le maître mot c’est la persévérance ! Il ne faut jamais renoncer, et toujours se battre pour réaliser ses ambitions.
Que peut-on vous souhaiter pour la suite ?
Parvenir à faire rayonner les îles de l’océan indien et nous approprier notre culture riche de traditions millénaires. Encourager le mieux vivre ensemble et trouver des solutions de développement pour que nos artisans puissent vivre de leur savoir faire.
Ambassade de France
Mon nom est Aîda ABOUTOIHI, j’ai 31 ans et suis originaire des Comores , ayant quitté les Comores très jeune, j’ai suivi des études de commerce à Bordeaux . Je me suis par la suite spécialisée dans le domaine de la banque –assurance à Paris.
Après avoir exercé une fonction d’encadrement au sein du groupe AXA France et par la suite France TELECOM j’ai décidé de rejoindre l’île de Mayotte en 2009 où j’ai travaillé au sein de la BFCOI (filiale de la société générale) c’est à ce moment là que j’ai rejoins l’association lainga culture océan indien en tant que trésorière.
Ensuite en 2011 je suis rentrée à Moroni, j’ai impulsé la création de l’ALCOI section Ngazidja en janvier 2012 et j’ai été nommé présidente de cette section.
Notre association se nomme Association Lainga Cultures Océan Indien (Alcoi). Le but de cette association est de promouvoir la culture de l’Océan Indien sous toutes ses formes. ALCOI a vu le jour à l’île de la Réunion en 2006. Le siège est transféré à Mayotte depuis 2010. Après avoir été trésorière d’ALCOI Mayotte, l’idée de créer la section de Ngazidja a germé étant de retour sur l’île. Ceci est devenu une opportunité qui a eu l’adhésion unanime d’ALCOI Mayotte. C’est là une occasion pour se rapprocher de sa population d’autant qu’elle a besoin d’un appui pour promouvoir son patrimoine culturelle dans toutes les îles.
L’idée s’est concrétisée ayant observé sur terrain qu’au niveau de la culture, les femmes s’investissent beaucoup plus que les hommes. Cette présence est effective dans toutes les activités traditionnelles, que ce soit la vannerie, les danses traditionnelles, la poterie, la chanson, en un mot dans presque tous les domaines de la culture. J’ai donc décidé de les accompagner parce qu’il me semblait que ces initiatives manquaient d’un encadrement leur permettant de s’exprimer comme elles le désiraient.
C’est donc l’objectif qui fut arrêté par l’Alcoi pour l’année 2012 :
« être proche de ces femmes pour les accompagner et les aider à s’épanouir ».
Nous sommes fiers de nos actions tout en restant humble, car depuis la journée que nous avons organisé au foyer des femmes, nous avons pu mettre en relation une association qui recycle les plastiques pour faire des sacs, des accessoires etc, en relation avec les bailleurs tels l’Union Européenne, à travers le PCD (Programme de Coopération Décentralisée). Grâce à cette manifestation, les femmes ont bénéficié d’une formation de huit jours, dispensée directement dans les villages. Cette activité leur a permis de valoriser leur travail en créant une cohésion et un projet commun. Pour nous c’est une réussite car notre objectif de vouloir les sortir de l’ombre est atteint.
Justement, sur la question de l’artisanat, j’ai noté qu’aux Comores on en parle finalement très peu. On possède cette impression que l’artisanat est très peu développé voire inexistant. Comment vous expliquez ce phénomène ?
Hélas c’est l’amer constat alors qu’auparavant l’artisanat comorien se voyait beaucoup plus ne serait-ce qu’au Marché. Je pense que cela est venu avec le fait que le transfert de savoir n’a pas été automatique, les jeunes s’intéressent plus à ce qui vient de l’extérieur, et tout le monde se rabat sur l’artisanat malgache. La dureté économique a laissé la place au pessimisme. La réflexion des femmes comoriennes est : « Pourquoi je vais me lancer dans l’artisanat et essayer d’en vivre puisque ça ne mène à nulle part ». Le changement doit intervenir ici !
Nous sommes là pour les aider à comprendre que les choses peuvent changer, que l’artisanat offre des débouchés, notamment vers les pays de la Région et qu’elles peuvent devenir actrices de leur propre destinée.
J’ai l’impression que maintenant il existe une lueur d’espoir, et que quelque chose s’est ravivée chez ces femmes. Elles commencent à prendre confiance en elles, et c’est la première condition pour faire naître ou renaître un artisanat quasi moribond.
Mais selon vous, pourquoi le rôle des femmes est si important pour les Comores, quelle place doivent-elles tenir dans l’évolution du pays et des mœurs ?
Nous convenons tous à dire que la société comorienne est matriarcale. Et donc la femme comorienne, je dis la femme parce que je la trouve extraordinaire, doit trouver les ressources et le courage et a besoin d’un accompagnement. Elle manque terriblement de confiance en elle.
Je suis convaincue que l’avenir des Comores c’est la femme avant tout ! Et je pèse mes mots ! Les comoriennes sont très, très dynamiques et elles réalisent des choses merveilleuses. Je pense que miser sur les femmes comoriennes, c’est s’assurer que la société évoluera dans le bon sens, et que les Comores pourront aller loin.
Il est vrai que la société comorienne est matriarcale, mais paradoxalement on s’aperçoit qu’il existe d’énormes disparités entre les hommes et les femmes, quels sont les points à améliorer, les choses à changer selon vous ?
Je pense qu’on a fait croire à la femme comorienne que pour être acteur du développement il faut nécessairement faire des études. Or aux Comores, les femmes par définition ne font pas d’études, ou beaucoup moins que les hommes. Elles ont dû rester au foyer, à élever les enfants, même si elles ont un certains potentiel, on leur fait croire que parce qu’elles n’ont pas fait d’études, elles ne pourront pas aller loin.
La réponse doit être une alphabétisation des femmes (lutter contre l’illettrisme) et également leur donner des formations dans les domaines de la gestion, du commerce, comment vendre leurs produits. Si je prends l’exemple de Planète Finance, sous la responsabilité de Mme Anne Delvern, je trouve que les actions entreprises sont formidables. Ils mettent en place des ateliers pour les aider à avoir ce volet de l’éducation dont elles ont besoin pour avancer.
Est-ce que la situation aux Comores est comparable à d’autre pays dans l’Océan Indien, puisque l’Alcoi est présente dans toute la région ?
Il me semble qu’il n’existe pas de parallèles possibles entre les Comores et les autres pays de la région. Je pense même que les Comores se trouvent dans une position de retrait, et possède un retard vis-à-vis des autres îles ou pays. Si je compare à Madagascar, où la situation économique est quand même assez précaire, là bas il y a une culture de l’artisanat très poussée.
Pour moi d’ailleurs, Madagascar est un exemple à suivre de ce point de vue là, puisque les femmes ont peu de moyens, mais parviennent néanmoins à réaliser des choses formidables.
Existe-t-il une action que la classe politique comorienne devrait entreprendre, afin de remédier à cette situation ?
L’Alcoi comme bons nombre d’associations ne peut se substituer à tout et à elle toute seule résoudre les problèmes de la société comorienne. Il faudrait créer des passerelles entre ces associations et les organisations gouvernementales et non gouvernementales. Et c’est sur ce point que l’Etat doit intervenir pour favoriser la création de synergies autour des différents acteurs du développement durable.
Je pense notamment au Commissariat au Genre qui représente un moyen de réaliser des actions concrètes. Une collaboration avec le commissariat, pour vraiment venir en aide aux femmes par exemple, serait quelque chose que nous pourrions mettre en place sans trop de réserves.
L’Alcoi reçoit le soutien de certains bailleurs de fonds et notamment la France, quel rôle la France peut-elle jouer dans le soutien de l’artisanat des femmes à Ngazidja ?
Le Fond de Coopération Régionale de Mayotte a joué un rôle important, et continu d’occuper une place centrale dans notre fonctionnement. C’est un allié de poids et je ne sais comment les remercier, parce que sans l’accompagnement du FCR, on ne pourrait pas réussir toutes ces actions.
Par exemple pour la journée de la femme que nous avons organisée le 10 mars 2012 au foyer des femmes de Moroni, soulever des fonds au niveau des acteurs économiques ici aux Comores a été un vrai parcours du combattant. Nous avions finalement réussi à le faire tant bien que mal, sans trop de moyens. Nous avons besoin de continuer à bénéficier du soutien du FCR dans nos actions, ici comme à Mayotte.
Quelles sont les prochaines échéances et dates importantes à retenir ?
Le salon de la mode a marqué ses premiers pas en 2008 dans la commune de Sainte-Marie (Ile de la Réunion). Le succès de cette manifestation rayonne encore aujourd’hui à mayotte grâce aux adhérents bénévoles de l’association, de nos partenaires et de nos sponsors.
Le principe de ce dernier est une réalisation à partir d’un tissu choisi et fourni gracieusement par l’association. Le tissu varie en fonction des années ; par exemple en 2009, c’était le tissu salouva ou lesso qui a été choisi ; en 2010 c’était la toile de jute.
Ensuite au mois de septembre, nous désirons mettre en place un calendrier au niveau des écoles, c’est-à-dire proposer des ateliers au sein même des établissements. Avec des activités comme par exemple réaliser des objets avec des sachets recyclés, ou la danse traditionnelle comorienne, et ainsi de suite pour sensibiliser les enfants à la culture.
Puis il y aura le concept Lainga qui veut dire errer en comorien : nous irons faire le tour de toutes les régions de la Grande Comore, pour mettre en place ce concept. Il s’agit d’allier la culture moderne à la culture traditionnelle. Nous amenons la culture moderne (projection films comoriens, danse contemporaine, théâtre…) dans les villages, et les villageois partagent la culture traditionnelle (différentes danses traditionnelles…).
Dans le futur, comptez-vous travailler avec les services de coopération français ?
Je pense que comme toute jeune section nous avons besoin d’asseoir notre crédibilité, donc je pense qu’à travers toutes les actions que nous souhaitons réaliser, nous approcherons naturellement les services de coopération culturelle français comme nos confrères de l’Alcoi Mayotte. Pour le moment il me semble que c’est trop précoce, il nous faut d’abord faire nos preuves à la Grande Comore en menant à bien des projets. Mais par la suite nous aurons besoin d’eux, ça ne fait aucun doute.
Votre stratégie de développement prévoit-elle un rapprochement avec d’autres associations dans l’avenir ?
L’objectif final de l’Alcoi est de devenir une ONG, et donc pour y parvenir nous allons nous rapprocher d’autres associations issues des autres îles de l’océan indien. Des prises de contacts sont en cours d’étude avec des associations de Madagascar et la réunion afin créer de véritables échanges de savoirs faire. La mairie de Moroni encourage véritablement nos initiatives. Pour le moment nous travaillons avec l’association féminine d’Itsandra (AFDS) qui est notre partenaire, au même titre que le Campus Paysan, nous avons une association d’homme qui fait des spectacles de danse traditionnelles, nous avons aussi une troupe musicale qui va être partenaire et deux autres associations féminines qui nous rejoindrons.
Mais justement nous essayons d’avoir des entretiens avec ces associations en leur disant « voilà, il faut absolument être dynamique, et œuvrer pour un but réel ». Donc un choix pointilleux est fait en amont par l’ALCOI .
Le projet de devenir une ONG est pour quand précisément ?
C’est pour 2013 ! Et nous nous en rapprochons de jour en jour.
Comment fonctionne l’Alcoi, existe-t-il une rémunération ?
Non il n’existe pas de rémunération, c’est du bénévolat, cependant les membres de notre bureau sont très actifs et sont motivés pour accomplir leur mission. Nous ne pouvons nous permettre de rémunérer nos membres, et nous souhaitons que ça reste ainsi. Le bénévolat est le mode de fonctionnement que nous avons choisi et il nous semble le meilleur pour ne pas dénaturer nos objectifs.
Exercez-vous une activité professionnelle en dehors de l’association ?
Je suis rentrée aux Comores depuis plus d’un an et j’ai travaillé dans le domaine bancaire et suis actuellement missionnée par l’Onudi (Organisation des Nations unies pour le développement industriel).
Combien d’heure d’investissement représente votre activité ?
Je ne compte plus ! Je pense qu’il faut vraiment aimer ce qu’on fait, et se donner à 200% pour que les gens nous suivent. Il faut insuffler l’exemple pour changer les comportements.
Quels conseils donneriez-vous à une jeune femme désirant vous rejoindre, ou mener à bien un projet similaire ?
Le maître mot c’est la persévérance ! Il ne faut jamais renoncer, et toujours se battre pour réaliser ses ambitions.
Que peut-on vous souhaiter pour la suite ?
Parvenir à faire rayonner les îles de l’océan indien et nous approprier notre culture riche de traditions millénaires. Encourager le mieux vivre ensemble et trouver des solutions de développement pour que nos artisans puissent vivre de leur savoir faire.
Ambassade de France